Du non ... au oui
Dernièrement nous avons eu connaissance d’un échange entre amis de l’Ami dont voici le sujet : Convertir le « non » si souvent vécu en un « oui » sans crispation.
Voici quelques extraits de cet échange, suivis de réflexions et d’anecdotes toutes reliées à ce questionnement. Prendre connaissance de ce qu’a dit Yvan sur le sujet peut être utile…
Voici les grandes lignes de ce dialogue à 4…dont nous avons retenu l’essentiel.
La question posée :
- Je cherche un moyen de convertir le non que je dis en permanence ; en ce moment je suis un bloc de « non »… la seule chose que je vois c’est de dire oui oui oui à haute voix, il me semble que le dire dans la tête ne suffit pas. As-tu quelque chose à dire là dessus ?
En plus du travail de dénonciation, ma question du jour c’est la conversion du non à tout … en oui. Nourrir le oui, mais comment ?
Oui oui oui, je vous embrasse (c’est déjà un petit quelque chose).
- une première réponse :
Peut-être est-ce la nature de la relation que nous avons avec notre façon de dire non qui va déterminer en quel être humain nous allons nous transformer pour dire oui ?
-Je ne sais pas comment "nourrir le oui" mais je peux pratiquer chaque jour sur ma façon de dire non (c'est pratique, je n'en manque jamais) et si j'entre vraiment en relation avec celui qui dit non, je découvre une façon qui lui est propre de dire oui.
Faire partie d'un groupe de personnes qui pratiquent un travail est à mes yeux une aide précieuse dans la pratique.
La réponse à la réponse :
Je te rejoins bien sur le côté inépuisable des non.
Je me demande : Qui a peur ?, qui refuse d’aller avec le courant de la vie ? Quand j’ai peur, est-ce que je peux vraiment être touchée ? J’ai l’impression que le non s’en trouve ébranlé et que le oui prend un peu de place.
Nouvel échange, nouveau participant
Il me souvient que j’avais évoqué, lors d’un entretien avec Yvan Amar, le « Oui » de Thérèse de Lisieux s’obligeant à accepter,lors des offices, le grincement de dents d’une carmélite auprès de laquelle elle était placée. Elle pouvait, dit-elle, demander à la sœur supérieure de l’éloigner de cette carmélite âgée ou alors transformer cette irritation éprouvée en acceptation, en accueil. Elle choisit d’accueillir et le grincement de dents devint une douce musique.
Yvan m’avait répondu qu’il fallait passer du « Oui à », du oui aux grincements de dents en l’occurrence, au « Oui de », le Oui de Dieu.
Nous sommes alors déifiés, ouifiés disait Yvan.
Mais pour vivre ce « oui » il faut être de cette conscience-là, puisque ce « oui » n’est pas le résultat d’un effort auquel on s’oblige, puisque c’est la manifestation de la grâce.
On retrouve l’idée du « lâcher prise » évoqué par Yvan. Le lâcher-prise est réalisé quand Dieu tient prise. Yvan précisait qu’il faut se méfier de ceux qui vous demandent de lâcher, ils veulent le pouvoir sur vous.
Que dit Yvan ? :
Explorez ce que vous refusez, explorez la façon dont vous dites non. Les mécanismes par lesquels vous refusez continuellement ; vouloir accepter, cela fait partie des mécanismes du refus, c’est le refus du refus. Et mieux vous verrez comment vous dites « non », moins vous chercherez à dire oui à quelque chose et plus vous écouterez ; et plus vous écouterez et mieux vous entendrez. Jusqu’au jour où ce que vous ressentirez sera tellement fort que vous aurez du mal à refuser, alors vous ne pouvez que vous ouvrir davantage à ce que vous ressentez. A ce moment là, vous vous êtes accepté ; et quand vous vous êtes accepté, vous êtes l’acception.
Celui qui aujourd’hui demande comment accepter cela, aura disparu.
Entendre, c’est être « ouifié » vous devenez « oui ».
Un quatrième participant se manifeste
Nous aspirons, nous voulons accepter*, lâcher prise, mais un enseignement ne nous le demande pas.
L’enseignement propose un travail et ce travail demande un effort.
Nous pouvons considérer que, vouloir accepter, c’est renforcer le processus de refus de la situation présente, c’est se culpabiliser de ne pas pouvoir accepter. Refuser ce qui est et se refuser soi.
Yvan
On ne peut pas escamoter le travail sur soi sinon ce n’est pas de l’acceptation, c’est de la résignation, ce n’est pas l’abandon à sa divine providence, c’est de la démission. La victime ne peut pas s’abandonner, se soumettre.
Souffrir ou s’ouvrir.
Le chemin n’est pas facile, une démarche demande beaucoup de rigueur, un travail conscient …
Demandez vous si vous êtes prêt à chaque instant à vous y consacrer.
Tant qu’il y a en nous « j’aime, j’aime pas » on ne peut pas parler d’acceptation, on ne peut pas parler de lâcher-prise.
Notre drame, c’est l’ambition, quelque part de vouloir être l’auteur du lâcher-prise.
La simplicité, c’est déjà de reconnaître qu’on ne peut lâcher prise. On peut être intime avec « comment on tient », « comment on s’accroche », sans condamner.
- et après ?
- après l’émerveillement, il n’y a pas d’après. Il y a le faire de Dieu ;
Le faire de l’homme est toujours un faire intéressé, même s’il est hissé au niveau collectif ou planétaire.
Le faire de Dieu, n’est pas un non-faire mais un faire pour rien. Qui veut s’approprier un résultat, qui cherche l’efficacité, cherche à être juste, à être bien.
Par notre pratique, notre coopération réelle avec l’enseignement, nous avons pu nourrir en nous le pressentiment du réel, l’intuition du divin, alors le lâcher prise, c’est le passage du « faire » de l’homme au « faire » de Dieu ; du « faire » intéressé par le résultat au « faire » pour rien …, offert…
Vous vous posez encore des questions ?
« Continuez la pratique, ne pas s’arrêter à l’émerveillement, faites grandir ; l’enseignement ouvre le chemin de votre cœur, vous ne pourrez plus vous passer de cela et cela est vous, pas un autre. Aspirez à cette façon de faire où l’auteur du « faire » disparaît.
Si le lâcher-prise est une entreprise individuelle, née d’une décision personnelle, ce n’est pas un lâcher-prise.
Le lâcher-prise ne peut exister que dans un cœur où tout d’un coup il y a le miracle de la confiance.
Notre conscience habituelle est une conscience, qu’on le sache ou pas, habitée par la peur. La séparation, c’est la peur, peur du manque, peur liée à la conscience de la séparation, peur qui incite à de nombreuses relations, pour ne pas vivre la séparation. L’être qui vit dans cette peur ne peut pas lâcher le moindre élément qui pourrait apparemment annuler cette peur.
Le simple fait de ne pas être dupe de nos comportements ne les fait pas disparaître.
Le lâcher-prise, c’est le miracle de la confiance
Faire pour quelque chose, non faire pour encore quelque chose, c’est souvent un « laisser-aller !
Dans notre voie, on parle de « faire pour rien » , ce qui sous-entend que ce n’est pas le « faire », l’action, qui est remis en question mais la façon dont cela est fait. Si effectivement l’être libre fait pour rien, cela exclut de notre voie, de notre chemin, les tentatives souvent frustrantes de « ne pas faire ».
Il y a une façon de conduire le faire, de gérer le faire ; si cela débouche sur « faire pour rien » ça ne veut pas dire pour autant que dès le départ ça doit être comme ça ; on va être confronté immédiatement au fait que l’on est incapable de gratuité, tant qu’on est déterminé par l’intérêt personnel, on est incapable d’une telle action…
La pratique, le souvenir
Ce qui va distinguer radicalement le comportement du chercheur, du disciple, en plus de la conscience dans l’action quotidienne, c’est une forme de conscience qu’on appelle le souvenir ; c’est cultiver le rappel du réel .Et cette pratique du rappel, cette pratique du souvenir, n’est pas un comportement issu de la mémoire, destiné à produire un résultat : c’est faire pour grandir, ce n’est pas « faire pour être grand » ! Faire, c’est grandir. La pratique du souvenir nourrit le pressentiment du vrai, seul lieu de croissance. Cette pratique n’est pas issue de la mémoire mais au travers de la transmission, au travers de l’enseignement, issue elle-même du réel, elle est révélée. Toute voie traditionnelle est fondée sur une révélation, une révélation qui n’est pas historique en soi, le révélateur n’est que le véhicule du moment.
Cette pratique-là a le pouvoir d’effacer le pratiquant… Le faire devient grandir.
Vous avez le faire autonettoyant !
Textes repérés par Mireille
Dernière réponse d’un dernier intervenant : vivre la relation à l’autre différemment
- Qu‘est ce que nous refusons dans la relation ? De qui sommes nous victimes ? De l’autre ? De moi n’arrivant pas à accepter ? Des deux sans doute…
L’autre nous offre l’occasion de regarder intimement nos comportements, pourquoi négliger cette occasion ?
Nous souffrons ? Pourquoi aimerions nous tant accepter ? Pour moins souffrir semble t il ?
N’avons nous pas entendu : plus vous écouterez, plus vous entendrez ?
Avant de dire oui, d’entendre oui, voyons comment nous disons non ; Ce oui là peut être oui, peut être non.
Enfin, ce travail fait, accompli, l’effort et la grâce unis, nous découvrons qu’en relation l’homme ne grandit jamais seul.
Extraits des cassettes : 44, 171, 178, 82, 172
Pour ceux qui veulent aller plus loin : le « vécu du oui » cassettes : 272, 281, 288
*Le lexis, dictionnaire de la langue française, nous dit :
Accepter, c’est tolérer, se résigner, supporter.
C’est aussi consentir, prendre ce qui est offert, proposé ; ce peut être aussi accueillir (ex : accepter quelqu’un dans son cercle), le contraire c’est refuser.