Réponse à une demande
Une lectrice du blog nous demande à connaître le parcours de vie d'Yvan et suite à cette demande l'équipe du blog a décidé de réunir divers éléments biographiques, des souvenirs ....
Nous lançons donc un appel à toutes celles et ceux qui voudront bien partager quelques souvenirs.
"Vers la fin des années 60, Yvan était ce qu'on appelait alors "un routard" et sur la route, on parlait beaucoup de l'Inde...
Il avait lu Les grands initiés d'Edouard Shuré, évoquant la vie des sages à différents moments de l'histoire de l'humanité.
"J'avais surtout noté l'importance qu'avait eu pour eux une relation avec un maître ..." dit-il ; il avait 17 ans.
Au cours de l'été 68, à Nice, il rencontre un jeune homme qui revenait d'Inde et, tout en lui conseillant d'acheter L'enseignement de Ramakrishna - qui deviendra son livre de chevet par la suite - lui apprend à chanter des mantras et l'initie à la méditation... "Une journée décisive dans ma vie..."
L'hiver et printemps suivant, il part au Danemark avant de se décider à l'automne 69 de partir en stop avec l'intention de rejoindre Rishikesh, au bord du Gange, sur les contreforts de l'Himalaya.
India
A Rishikesh, il rencontre tout d'abord deux canadiens puis une américaine qui lui parlent d'un homme vivant sur une petite île forestière au milieu du Gange... puis une européenne lui montre un livre de ce même homme dans lequel figure sa photo. Il passe la nuit à recopier les trois quart de l'ouvrage. Elle lui donne alors les indications pour le rejoindre et il les suit...
Cela fait 15 jours qu'il est en Inde.
Ainsi fait-il la connaissance de "l'homme vivant sur une petite île forestière au milieu du Gange" : Chandra Swami, auprès duquel il vivra près de 3 ans en deux séjours très rapprochés. Pour subvenir à ses besoins, il mendiera sa nourriture pendant un peu plus d'un an en compagnie des mendiants et sâdhus jusqu'au jour où Chandra Swami aura construit sa maison-ashram et l'invitera à intégrer le groupe des disciples indiens.
En cela, il fut le premier disciple étranger.
En 1972, pour des raisons de visa, il revient en France, très malheureux de quitter Chandra Swami qui lui assure "ne t'inquiète pas, tu rencontreras quelqu'un en France qui t'aidera "... Juste avant de partir, il revoie l'amie qui lui avait prêté le livre et indiqué comment trouver Chandra Swami. Encore une fois, elle va le renseigner : " En France, il y a une personne à rencontrer c'est Jean Klein "...
Quelques mois plus tard, Jean Klein lui accorde un rendez-vous à Paris...
Yvan raconte : " et il s'est passé quelque chose d'extraordinaire : nous sommes restés en silence quasiment tout le temps - peut-être trois quart d'heure. Installé sur son canapé, il prenait des postures que je n'ai jamais revues chez lui par la suite et qui étaient typiquement celles de mon maître indien. Sans qu'il fut prononcé un mot, j'ai su que c'était l'homme dont m'avait parlé Chandra Swami ".
Il passe un an auprès de lui... " Il a complété mon itinéraire par un approfondissement du rôle de la conscience corporelle dans l'approche de la réalité non-duelle.../... Au bout d'un an, il m'a dit que je pouvais le quitter, me conseillant de m'installer et d'utiliser ce que j'avais acquis aiprès de lui dans le travail corporel, ne serait-ce qu'en enseignant le yoga ".
Ce qu'il fait à Aix en Provence. Il rencontre alors celle qui deviendra par la suite son épouse, Nadège, avec qui il repart 6 mois auprès de Chanda Swami.
En 1979, raconte-t-il, est arrivé une confrontation décisive.../... j'ai alors eu le sentiment que je vivais dans un mensonge ; que je n'étais pas vraiment en accord avec moi-même. J'étais devenu un yogi respecté des gens alentours.../... mais au fond de moi, je savais que j'étais toujours le même. J'avais modifié bien des choses mais dans mon coeur rien n'avait changé.../... je commençais à pressentir qu'en réalité je cherchais une "planque ultime"...
Il réalise que depuis des années, il n'a fait que rechercher un "au-delà"... un au-delà du corps, un au-delà des émotions, un au-delà de la pensée... "cet au-delà était toujours une façon de ne pas m'engager dans ce qui était là"... et qu'il lui est impossible de continuer à vivre dans une telle histoire.
Il saisit qu'il a toujours mené, jusqu'à présent, sa quête à partir de la croyance qu'il est tout d'abord nécessaire de vivre l'expérience du réel transcendant pour revenir ensuite dans le monde ; or, au fond de lui, il pressent qu'il doit exister une voie au sein du monde, une voie de l'immanence où il est possible de vivre le Réel.
"A cet instant, j'ai senti que je prenais un risque immense : le risque de quitter le chemin de la transcendance. Soudain je quittais mon image de grand yogi capable de faire le silence intérieur... ce jour-là, je dis à Nadège : je joue un coup de poker : je renonce à tout ce à quoi j'ai cru pendant toutes ces années.../ et j'ai pris le risque de la vie, le risque de ne plus chercher au-delà.../ D'un coup je me suis défait de tout ce avec quoi j'avais fonctionné. Totalement, sans rien préserver, sans rien sauvegarder".
Pendant trois jours, il a senti progressivement quelque chose qu'il n'avait jamais senti depuis sa naissance... "J'ai senti la vie ; je suis allé vers ce qui était là et j'ai senti que la vie entrait en moi. J'ai senti que cette vie m'aimait comme j'étais, tel que j'étais. C'était comme si elle m'attendait.../ J'ai alors compris pourquoi les grands mystiques parlent de la Mère Divine : parce que ce sentiment d'amour de la vie envers vous, on l'éprouve dans l'amour absolu d'une mère. On est dans les bras de la Mère Divine ... Aucune vision, aucune hallucination, c'était quelque chose de très simple, de concret et d'immédiat, qui me prenait à l'intérieur et que je reconnaissais."
En Février 80, il retourne voir Chandra Swami qui confirme l'éveil vécu et lui enseigne la nécessité d'une vie qui devait permettre à cette Conscience de s'incarner davantage en lui.
De 1980 à 1987, il y travaillera.
Chandra Swami lui avait dit : "C'est toujours ainsi. Il y a d'abord l'éveil, l'expérience soudaine, inattendue de la réalité, qui peut durer quelques jours puis disparaît. Puis, après des années, cela se stabilise. C'est alors la réalisation. La durée nécessaire à cette stabilisation est fonction de la nature de la personne".
En 1989, Yvan commence à ressentir les effets de la stabilisation... Il se sent naître comme instructeur. Peu de temps après, il reçoit une lettre de Chandra Swami qui lui demande de transmettre. Yvan retourne alors en Inde, désireux de procéder selon les règles traditionnelles. Puis à partir de 1990, les gens ont commencé à se rassembler autour de lui.
Ces quelques informations, sélectionnées par Jean-Pierre P.(1er) , sont extraites du livre d'Yvan "L'Effort et la Grâce" (Albin Michel).