Joëlle, l’amie de Marseille
Ce mardi 10 décembre à 22h le corps de Joëlle a cessé de vivre, que tous ceux qui l'ont connue et rencontrée puissent penser à elle en ce moment et pour encore quelques temps...
C’était il y a bien longtemps…en 1990, en Normandie.
A la question posée, existe-t-il une âme ?
Yvan répond :
- « L’âme n’existe pas. Tant que le miroir d’une identité séparée est maintenu en nous, le reflet de la vie dans ce miroir est ce qu’on appelle une âme. (…)
Une chose est sûre, lorsque la conscience s’éveille, tout ce qu’elle aperçoit est vivant. ; il n’y a rien qui soit réellement hors du champ de la vie. Nous avons une définition très restrictive de la vie parce que notre définition se rapporte à la définition biologique, ce qui peut se reproduire, le cliniquement vivant. Selon le point de vue d’où on perçoit, on va attribuer aux êtres et aux choses, une vie et éventuellement une âme.
Pour nous, attribuer une âme, c’est conjurer la mort.
En fait, qu’est ce qu’une âme ? Si ce n’est la possibilité de survivre au désastre final ? C’est une assurance, c’est la garantie : je peux mourir, mon âme demeure.
Dans une voie, pour y gagner la vie il faut y perdre son âme.(…)
Et de temps en temps, on se dit, peut être bien quand même que j’ai une âme qui va se réincarner, qu’on va recommencer … (rires)
Être confronté à un enseignement qui va balayer tout ça, c’est être confronté là encore, à notre peur. Tout est vivant, l’âme est de trop.
Et qui pose la question finale ? Joëlle :
- L’immortalité de l’éveillé c’est simplement se sentir un avec la vie, donc comme la vie continue ?
- Yvan : oui, c’est être un avec la mort.
La mort est immortelle.
(Rires…)
Road moovie
Pourquoi cacher l’hiver sous mes rêves de sable ?
Mon âme est quelque part sous mes kilos de chair,
Le soleil chauffe l’air même derrière un voile,
Quel danger de courir quand il ne fait pas clair !
Kyrie Eleison, Ô Dieu des sanctuaires,
Moi je vous aurais cru plutôt Dieu des armées,
Quand je rêvais de paix vous m’envoyiez en guerre :
pas le plus petit creux où pouvoir ronronner.
La liberté chérie, Ah, Ah, laissez-moi rire !
La première rencontre m’avait prostituée,
De libre je n’avais que le choix d’un martyre
Car d’amour insouciant, plus jamais, plus jamais…
Trop tard, j’avais mordu la pomme empoisonnée.
Les amis, la famille restaient dans l’autre monde,
Je jouais les pythies dans ma cour désertée.
Jusqu’aux fleurs qui disaient : nos couleurs sont mensonge.
À quoi bon, j’ai bâti pour vous des cathédrales !
Quand vous alliez partout, sauf sous mon toit doré,
J’étais, je le savais, la plus laide vestale.
Feriez-vous exception pour moi, Dieu de beauté ?
Bon ! je serais pirate, j’irais aux Amériques.
Mais mon rafiot restait solidement ancré.
Pourtant, je vous aurais abrité dans des criques
Où de vieux goélands enseignent à voler.
Quand je voulais m’enfuir, vous transformiez en plomb
Mes ailes de crépon, mon costume de ciel.
Mais qui donc m’a conçue ? Détestable avorton,
Jalouse des oiseaux, je crucifiais leurs ailes.
Pas une main amie, pas un œil bienveillant,
Pas la moindre pitié pour mes épilepsies,
Mirage d’herbe tendre et lac étincelant,
À mon cœur épuisé vous répétiez : JE SUIS.
Je suis celui qui suis, vous parlez d’une histoire !
Je vous imaginais magicien et bon père
Qui de l’enfer au ciel ne nous quitte jamais.
Oui, j’ai chanté transie la gloire du calvaire.
Tournez la tête un peu, contemplez le désastre :
Cadavres, cliquetants squelettes, somnambules
Sont les seuls avec moi à remplir le théâtre
Aux bannières brodées de vos cinq majuscules.
Une fois, une seule, respirer de votre air,
Un éclair de vos yeux pour enfin me coucher ;
Voyez mon corps grossier et mon âme vulgaire,
Mais que faut-il, Bon Dieu, pour vous apitoyer ?
Ah, ces vieux grelottants me feraient presque envie,
Et les ventres gonflés des enfants qui ont faim,
Mais vous m’engluez là et me gavez d’ennui ;
À d’autres les trophées et les poignées de main.
Alors que je rêvais missions équatoriales,
Vous me plongez au cœur des luttes sans péril,
Dieu des armées peut-être, mais sans cri de victoire ;
Les vrais révolutions se font seul dans la nuit.
Dans les couloirs glacés, mes songes de prophète
Se sont évaporés ; on n’attend rien de moi
Que cet anonymat qui fait courber la tête,
À servir des fantômes comme on ferait de rois.
Sans éclat, sans exploit, vous vouliez de mon âme,
La voir brûler sans cesse nuit et jour en secret,
Comme l’huile des lampes de ces dix jeunes femmes :
Cinq vous avez aimées, cinq autres rejetées…
Et pourtant la promesse ronronnait dans mon crâne.
La dernière lueur me rappelait toujours,
Au moment où j’allais vers les fêtes profanes.
Vous reveniez, mon cœur, bouleversant d’amour…
Pour toujours à vos pieds, mais plus rien ne m’attache,
Je confesse et j’accueille, je tiens et j’ai compris
Que vous n’aimiez pas plus les héros que les lâches,
Mais la simplicité d’un cœur qui convertit…
OUI
OUI
OUI
Joëlle Labadie
Publié dans la Gazette du Relié “Relie-moi” n°13 - décembre 1993